Extrême-Orient > Labeurs
C'est une image qui frappe généralement le voyageur occidental lorsqu'il arpente le Sud-est asiatique : l'omniprésence du travail – sa visibilité, dirons-nous. Loin d'être recluses dans des usines suburbaines, claquemurées dans des entrepôts aveugles ou cantonnées à des périphéries marginalisées, les activités humaines s'épanouissent au vu de tous. En ville comme à la campagne, les rez-de-chaussées béent sur des ateliers familiaux, on entre dans les briqueteries comme dans des moulins, les courettes et les trottoirs sont envahis de camelots, d'artisans, de tabourets en plastique ou de casseroles en fer blanc, de statuettes bouddhistes ou de coiffeurs ambulants.
Épicentre de cette frénésie commerçante, les marchés génèrent un trafic déboussolant, un ballet continuel de chalands et de colporteurs qui vont négociant les marchandises les plus diverses et surprenantes – monceaux de tissus chamarrés, pyramides de salaisons au fumet entêtant, rangées de bassines frétillantes, épices enivrantes et bric-à-brac étourdissant – une Babel de denrées et d'ethnies, où fusent les devises et bruissent maints idiomes. Et que dire des ports ?
Hors des villes et des bourgs, la campagne, surtout celle des deltas, des fleuves et des littoraux, est à peine plus paisible. Le secteur primaire y demeure très dynamique, les rizières requérant souvent le gros de la main-d’œuvre, mais les plantations d'hévéas, de théiers ou de bambous, les champs de canne à sucre, les parcelles de maïs, les bananeraies ou les cocoteraies, mobilisent une attention de toutes les saisons. Routes, canaux, pistes sablonneuses ou sentes bétonnées, les infrastructures labyrinthiques et chaotiques relaient cette activité intense. Mobylettes et buffles sont de redoutables usagers...